Par un beau matin ensoleillé de décembre, je franchis les portes rouges de la cathédrale et me retrouve dans la pénombre sereine de l’église. Je descends sur la pointe des pieds l’allée latérale de droite par respect pour l’unique occupant des lieux, un colosse blotti dans un volumineux manteau et qui fronce les sourcils sous mon regard rapidement détourné. À une table à l’arrière, le sacristain en chef parle à voix basse sur son portable. Nous avons rendez-vous. Il hoche la tête et lève son index, me faisant signe « une minute ». « Ça ne sera pas long, » fait-il.

C’est par amour que John Cavacece s’est retrouvé à Montréal. Cela fait maintenant sept ans qu’il a marié la femme qu’il a suivie ici. Il me dit avoir travaillé en Colombie-Britannique comme grutier pour Rio Tinto pendant 32 ans. Ayant pris une retraite anticipée, il a vite appris qu’il n’est pas fait pour se la couler douce.
« Au bout de quelques mois, je m’ennuyais assis dans mon appartement à faire ça », dit-il en se tournant les pouces pour souligner à quel point l’oisiveté l’embête.
En 2011, il est venu travailler à temps partiel comme sacristain à la cathédrale. Après avoir quitté son poste pour travailler quelque temps à l’église St-Georges, rue Peel, il est revenu à la première occasion.
Notre conversation est interrompue par l’arrivée d’une femme qui pose énergiquement deux boîtes de biscuits sur la table devant lui. « Ils sont pour vous », dit-elle. « Pour votre salle de repos. Joyeux Noël ! »
John échange quelques mots avec elle. Il la remercie et blague que son collègue le plus gourmand appréciera particulièrement le cadeau. Pendant la demi-heure que nous passons ensemble, il s’occupera à la fois avec doigté tant de notre entrevue que des requêtes des membres du groupe Anglican Women in Communications. Ces dernières s’affairent à mettre en place le buffet qui suivra le service commémoratif qu’elles ont organisé en l’honneur des jeunes femmes tuées à la Polytechnique il y a 28 ans.
Respecter le refuge
« Vous devez en avoir plein les yeux, » dis-je à John.
« Ça oui, » répond-il.
Je lui confie que lors d’une de mes premières visites à la cathédrale j’avais été surprise d’y voir un ronfleur à l’air bourru qui s’appuyait contre une colonne pour dormir. « Lorsque j’étais petite, on m’a appris qu’il fallait être correctement vêtu et bien se comporter à l’église », dis-je.
« On peut dormir, mais il ne faut pas s’allonger », dit John. « C’est la seule consigne. »

L’accueil de la cathédrale s’étend jusqu’à son terrain. Il n’est pas rare d’y apercevoir plusieurs sans-abri endormis sur l’herbe ou réfugiés sous le portail. On s’attendrait à ce que cette gentillesse inspire le respect de l’environnement, mais ce n’est pas toujours le cas. L’été dernier, quelqu’un a fait un feu dans un coin du bâtiment.
« Nous avons dû les bannir », dit John avec un calme surprenant, considérant les dangers auxquels ces personnes ont soumis tout ce qui lui est confié. « Après quelque temps, nous les avons laissés revenir, mais nous leur avons fait comprendre qu’il faut se soumettre au règlement : pas d’alcool, pas de drogue, pas de vandalisme. »

John et son équipe s’assurent que cette politique soit respectée, faisant appel à la police si leurs avertissements et remontrances ne sont pas écoutés.
Le côté sacré de la tâche
Les sacristains de la Cathédrale connaissent leurs gens et se soucient vraiment d’eux. John me parle d’un homme qui se rend à la Cathédrale tous les jours, sept jours par semaine, à longueur d’année.
« Il prie d’abord debout un moment puis s’assied, appuie son front contre le dos du banc devant lui et s’endort. Il vient tous les jours de la semaine jusqu’en fin d’après-midi et reste jusqu’à la fermeture les fins de semaine. S’il n’y est pas, nous le cherchons. Si nous lui demandons où il était passé, il répond simplement, “Away.” Il n’aime pas beaucoup parler. »

Le titan aperçu en entrant me vient à l’esprit. Je ne serais pas surprise si c’était lui, l’habitué taciturne. Cela me fait chaud au cœur de savoir qu’il est entouré de John, de Jeffrey Mackie et de Rod Roberts, les sacristains compétents et empathiques de la cathédrale Christ Church ; des hommes de cœur, quoi.
Je me tourne vers John : « Qu’est-ce que vous aimez le plus dans votre travail ? »
« L’aspect spirituel », dit-il, me surprenant à nouveau, cette fois par son manque de cynisme.
« Voir les gens qui se recueillent alors que je balaye les planchers. »
Je crois comprendre. Malgré tous ceux qui se promènent ou qui dorment dans un coin, qui installent un kiosque ou étalent un buffet, qui épinglent un dépliant au tableau d’affichage ou qui posent d’interminables questions, l’atmosphère du lieu en est un de paix. C’est ce qui permet aux gens de prendre contact avec le côté spirituel de la vie, de se souvenir qu’ils appartiennent à quelque chose de beaucoup plus grand qu’eux, de retrouver un peu de sérénité en ces jours difficiles et incertains. C’est l’esprit de la cathédrale Christ Church, un esprit nourri et protégé par John et son équipe, qui entretiennent le bel édifice et ses jardins tout en veillant aussi sur ceux qui leur sont confiés pour un moment ou pour la vie.
Nadia Kouvasheva en concert dans le cadre de la série de l’Oasis Musicale
La pianiste russo-australienne Nadia Koudasheva présente un récital comprenant non seulement des chefs-d’oeuvres virtuoses de Rachmaninov et de Ravel, mais aussi de rares trésors de la tradition russe des oeuvres transcrites de Bach. Lauréate de plusieurs prix et récompenses, Mme Kouvasheva est une soliste active, une chambriste, une accompagnatrice et une enseignante qui a également joué en Australie, en Russie et dans plusieurs pays européens.
Quand: le samedi 20 janvier à 16 h 30
Où: Cathédrale Christ Church, 635, rue Ste-Catherine Ouest, Montréal
Don volontaire suggéré : 10 $
Soutenez la restauration de notre belle cathédrale
Des sommes recueillies par la campagne, 7 470 000 $ serviront à réparer la flèche, à restaurer la maçonnerie et les éléments architecturaux et à améliorer les installations à l’intérieur de l’église. Une somme de 180 000 $ est prévue pour la restauration de l’orgue Karl Wilhelm et pour remplacer le piano de concert. Faites un don aux générations futures : cliquez ici et contribuez à la campagne. Grand ou petit, chaque don compte!
À vous la parole
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